Roger: il était une fois des belges en voyage en Iran 2009

Chers Reza, Hadji et Behrouz,

D’abord, je voudrais demander à Reza de transmettre les remerciements sincères et profondes de tout le groupe ICTAM (I., C., T., A., M.-agence de voyages Belge) à nos deux chauffeurs Hadji et Behrouz.

Nous avons énormément apprécié :

  • leur professionnalisme dans un trafic parfois très dense et dangereux, surtout dans les grandes villes, que nous avons visité
  • la propreté du bus
  • leur dévouement et leur bonne mine
  • leur bons soins pour nos affaires, surtout les jours de déplacement (valises)

Nous sommes venus au terme d’un voyage qui nous a conduit de Belgique (B.,E., L., G., I.,Q.,U.,E.- royaume de 1830 jusqu’à nos jours, avec comme rois, Leopold I, Leopold II, Albert I, Leopold III, Baudouin I, Albert II) en Iran, où nous avons parcouru quelque 5.000 km (y inclus notre trajet de Isphahan à Téhéran).

Certains entre nous avaient, les dernières semaines avant notre départ, quelques réticences, pour ne pas dire, une certaine peur, d’entamer ce voyage, et cela pour des raisons bien claires, qu’il ne faut pas expliciter ici.

Beaucoup de nos amis en Belgique avaient de la peine à ne pas exprimer leur doute concernant la santé de notre état d’esprit.

Mais dès notre arrivée à Téhéran, nos doutes ont disparu sur le coup, comme neige au soleil. En effet, nous nous voyions accueillis par un monsieur grand, fort et robuste, avec une voix sonore de bariton et d’un comportement rassurant.

La première chose qui nous frappait était le fait que ce monsieur avait vraisemblablement beaucoup d’influence et même ungrand pouvoir auprès du gouvernement Iranien.

En effet, il était à même de nous offrir directement le poste collectif d’ambassadeur de son pays à Bruxelles.

Et dans le courant de notre voyage, Reza (= ce monsieur toujours content) devenait petit à petit un véritable Reza Sjah, qui réunissait en sa personne, plusieures qualités.

Ainsi, il figurait notamment comme :

  • Agent de police passionné, réglant le trafic afin de nous permettre de traverser en sécurité les rues des villes visitées, ou réprimendant des jeunes, dont il méfiait les intentions;
  • Animateur matinal, qui, dès notre entrée dans l’autocar, nous souhaitait la bienvenue, utilisant l’idiome du Club Med («bonjour», «bien dormi?»«tout le monde en forme», dans l’attente d’un grand OUI sur ses questions,
  • Exploitant et au moins «maitre» dans les restaurants visités, en prenant les commandes des soupes d’orges, les bières non alcooliques et les soft-drinks,
  • Pasteur et compteur de moutons, dont jusqu’ici il n’est pas clair s’il s’agissait dans son opinion de moutons blancs ou moutons noirs. Pourtant il aurait pu s’épargner cette peine, en contrôlant simplement l’arrivée de Ria et Rita, nos deux photographes qui complétaient toujours nos rangs
  • Tonton tapis et bazari;
  • Acteur et déclamateur de la poésie de Saadi et de Hafez, surtout quand il y avait une audience Iranienne à deux pas;
  • Grand sage dans tous les signifactions;
  • Futur ministre de la culture;
  • Jeune prince perse, du moins selon la carte de visite qu’il nous offrait;
  • Fondateur de l’Etat Libre d’Azerbeidjan, avec comme capitale sa ville natale de Baku, avec Reza comme Sjah, les Rezastans comme habitants et la petite Daniz comme princesse-héritière;
  • Ayatollah et Guide Suprême, malheureusement sans tulband, raison pour la quelle, les rayons de soleil, atteignant son crâne, demontraient sa vulnérabilité humaine;
  • quelquefois, nous avions même l’impression que le 12me Imam était revenu sur terre et se trouvait entre nous.

De toutes ces qualités, Reza, tu nous a surtout laissé profiter de tes dons de Guide Suprême et de professeur d’histoire.

Pendant tout notre voyage, Reza, tu nous a conduit à travers l’histoire compliquée, mais tant fascinante de ton pays. Désormais, l’Iran pour nous n’est plus le pays du bazar, ni du bizarre, mais le pays des merveilles.

Inutile de répéter tout le parcours que nous avons traversé sous ta direction, admirablement secondé par Ria.

Toi-même en français et en galop, et Ria en flamand et d’une manière plus à l’aise et plus lente, vous nous avez rappelé ce parcours.

Regardant dans le rétroviseur de ce voyage, je dois avouer que de plus en plus, L’Iran devenait un vrai drogue, cette fois-ci ne venant pas de lAfghanistan mais de ta bouche, et dont il sera énormément difficile à desintoxiquer.

Finalement et grâce à toi, nous commençons à nous connaître un peu dans l’histoire, les royaumes, les déesses et dieux de l’Iran.

  •  Nahunté nous est présentée comme la déesse de l’inceste divine
  • Anahita (qui pour des raisons d’indolence, par certains entre nous était rebaptisée en Juanita) est devenue presqu’une amie, qui chaque jour nous réjouissait avec son «Ap» et son «Ap-Tschoo» (avec le Tsch de Tschechoslovaquie).
  • Les glacières, citernes et autres qanats, n’ont plus de secrets pour nous
  • Les Shapurs, Bahrams, Cyrus, Darius et autres Xerxes sont désormais des B.I. (c.a.d. «bekende Iraniërs» ou «Iraniëns renommés», un peu comme les célébrités royales dont nous pouvons suivre en Belgique sur la télé les péripéties dans les émissions «Royalty» ou «Place Royale».
  • Les dynasties des Élamites, Mèdes, Achaemenides, Seleucides, Parthes, Sassanides, Seltsjouks, Mongoles, Timourides, Safavides, Zand, Kadjars et Pahlevi (je ne mentionne pas les souverains actuels qui ne boivent pas) nous ont été présenté comme des habitants successifs de notre rue, avec lesquels on pouvait aller boire un verre dans le café du quartier.

Et comment ne pas être impressioné par ta connaissance des religions qui simultanément ou successivement ont déterminé la pensée et la vie de vos ancêtres et de vos concitoyens, et dont les meilleurs aspects sont toujours présents dans ce merveilleux peuple Iranien.

Ainsi tu nous a initié notamment dans les secrets du culte du feu, dans les idéés de base du Zoroasthrisme, et dans le détachement et l’illumination intérieure du Soufisme. Tu as même réussi a nous expliquer que les Soufis, en sortant de leur quarantaine spirituelle, étaient en état de voir des aircos….

J’avoue d’ailleurs que personnellement j’aurai difficile de pratiquer les vertus du Soufisme, notamment la pauvreté et l’abstinence.

A travers tes explications, que dis-je, tes cours d’histoire, que certains de nous avaient de temps en temps difficile à suivre, et qui étaient tellement complets, que la pauvre Ria pouvait à peine ajouter quelque chose, votre personnalité s’est dégagée comme un grand connaisseur et admirateur de l’histoire, de la culture et de la poésie de l’Iran.

Sans pourtant d’oublier de nous régaler avec tes gestes, tes proverbes et bonmots que nous n’oublierons pas facilement et dont je mentionne entre autres :

  •  les signes de respect sur les bas reliefs
  • les expressions comme : «le renard tombe dans le piège, pris par sa qeue» et «un arbre ne meurt pas parce qu’il est coupé, mai rongé par les vers»
  • des blages comme «une belle-mère, c’est comme un cactus avec de belles fleurs mais aussi avec quelques épines»
  • les commandements «la photo… 5 minutes», «les photographes devant», «le foulard svp»

Pour éviter que ce discours soit considéré comme une hagiographie, même avant la mort du concerné, tout de même aussi quelques épiphénomènes pas forcément négatifs, mais qui démontrent une certaine dualité dans ta personnalité, probablement due à la lecture et l’étude du Zoroasthrisme :

  • le côté Ahura Mazda de ton caractère ensolleilé, complété par un peu Ahriman (ou était-ce seulement un coup de machisme qui de temps en temps te jouait des tours)…….
  • la contradiction entre ton amour pour la poésie avec sa clarté et son vocabulaire limité et d’autre part une certeine évasion dans l’explication des choses
  • La joie dans l’annonce des petits cadeaux et la difficulté de donner suite aux demandes classiques du touriste occidental (bazar, magasins), quoique finalement tous ont vu réaliser leurs voeux
  • La perfection des documents communiqués et la petite négligeance manifestée par la perte, de temps en temps, des petites notes des boissons
  • une méconnaissance choquante du système métrique, puisque 200 mètres dans la bouche de Reza équivalaient toujours un bon kilomètre Belge…..

De notre part nous devons avouer que certains d’entre nous n’étaient pas de simples voyageurs, qui se rangeaient facilement et toujours selon tes voeux, puisqu’is avaient aussi un mission secrète. Ainsi :

  • Rita est venu en Iran sous le couvert de photographier tous les monuments et tous les aspects pittoresques du pays, notammant les femmes plus ou moins cachées. Mais en fait, elle était là pour détecter le 3me centre d’enrichissement d’uranium. Comme tu as pu remarquer sur la télé, elle a réussi dans cette mission et a, de cette manière provoqué un changement dans la politique officielle du pays, puisque depuis, on s’est mis d’accord sur le contrôle par les représentants de l’Office Nucléaire des Nations Unies…..
  • Baudouin était là, principalement en tant que représentant du Guide Michelin, plus spécifiquement pour juger la qualité de la soupe d’orges et des toilettes. Ensemble avec sa femme il avait d’ailleurs aussi l’intention d’évaluer la qualité des suites dans les hotels. Malheureusement sur ce point il a du se limiter à la comparaison des lits jumeaux et les doubles lits……
  • Quant à moi, je l’avoue, j’avais pour tâche, à la demande de l’agence VOGUE, de prospecter quelques jolies Iraniennes, pouvant figurer comme modèle sur les catwalks Européens, après l’ouverture des frontières. Il n’y avait donc point raison d’inquiéter Josiane qui, évidemment était au courant de ma mission, que j’ai essayé de remplir en vrai Shirazien, sans arrière-pensée quelle que soit….

Comme dans les citernes de Yazd, notre tasse est remplie, nos valises sont pleines de tapis et notre disque dur plein à craquer. Il nous faudra laisser reposer notre esprit pour mettre de l’ordre dans les divers classeurs avec informations, sensations et sentiments enrichissants.

Partir, c’est mourir un peu.

Mais comme des vrais Phénix nous ressusciterons de nos cendres et nous parlerons.

De notre guide incomparable et des souvenirs inoubliables de ce splendide voyage (jusqu’à nouvel ordre le plus beau que Josiane et moi ont fait).

Pour exprimer notre sympathie pour la population Iranienne, dont l’ouverture, la beauté et l’hospitalité mais aussi la détermination de prendre, malgré tout, sa vie en main, nous ont énormément impressionné.

Pour prendre la défense de votre beau et fantastique pays, si méconnu et souvent outragé par des gens qui n’ont aucune connaissance de l’histoire, de l’âme, de la culture et de la pensée du peuple Iranien.

Isphahan, le 4 octobre 2009

Texte légèrement adapté après notre retour en Belgique

Roger

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