Khomeini est le leader du mouvement d’opposition religieuse contre la monarchie des Pahlavi. Il fut le plus important et le plus grand défi du Chah d’Iran à la fin de son règne. Ce qui aboutit finalement à la Révolution de 1979. Elle est également appelée la «Révolution islamique» au seuil de laquelle Khomeini établit la République islamique d’Iran.
Bien que Khomeini se soit présenté comme un opposant depuis 1962, plusieurs événements comme l’exil, la divergence entre les partis politiques, ainsi que les réformes royales, ont retardé son ascension au sommet de l’opposition politique.
Khomeini, malgré la présence de nombreux opposants de différents mouvements réussit à faire bouger toutes les couches de la société iranienne. Quel moyens lui ont permis cette réalisation ? Qui ont été ses partisans ? Quel message le différencia des autres opposants ? Quel sont les atouts de Khomeini dans son parcours politique ?
« Khomeini, le Chah d’Iran et la Révolution » est le titre de notre nouvelle publication qui a une approche historique pour répondre à ces questions majeures.
Le 5 juin 1963 a été le moment le plus tendu dans la période qui avait commencé depuis la deuxième moitié de la décennie 50. A cette époque, alors que le Chah avait lancé des réformes pour renforcer son pouvoir, il fut confronté à l’opposition du Grand ayatollah Borudjerdi[1]dont Khomeini était l’un des disciples. Son opposition visait les réformes culturelles et sociales.
Il avait une telle autorité que la majorité des chiites du monde suivaient ses idées concernant les sujets religieux et même politiques ou sociaux. Lui avait été impartial dans le conflit entre Mossadegh et le Chah et avait envoyé un message au Chah. Il l’incitait à la prudence et au respect de la religion officielle du pays, le chiisme, après le coup d’Etat du 19 août 1953. En même temps il critiquait ouvertement les nouvelles mesures.
L’imitation de la voix d’un prêcheur religieux proche de Borudjerdi , appelé Falsafi[2] sur la radio gouvernementale, provoqua la contestation par Borudjerdi à l’encontre des politiques éducatives, culturelles et des réformes agraires qui, à son avis, s’opposaient aux principes religieux de la société. Selon la réforme agraire, les terres des grands propriétaires auraient été données aux agriculteurs. Sachant que les agriculteurs, auparavant y avaient travaillé et obéissaient aux ex-propriétaires.
Après ces protestations, Borudjerdi avait menacé de quitter l’Iran, mais il ne le fit cependant jamais. L’opinion publique ne fut pas non plus informée de ses mauvaises relations avec le Chah. Lors de sa maladie, la Cour envoya d’ailleurs des médecins occidentaux à Qom et elle participa activement à ses funérailles.
A cause du décès de l’Ayatollah Borudjerdi et de ses nombreux éventuels successeurs à Qom, la Cour envisagea de choisir « marja-e taqlid » chiite hors d’Iran, c’est-à-dire dans un des séminaires de Nadjaf. C’est pour cette raison que le Shah adressa ses condoléances à un Ayatollah iraquien[3] Hakim, séjournant à Nadjaf, à l’occasion du décès de Borudjerdi. Mais, il y avait quatre[4] autres grands Ayatollahs qui étaient juristes et furent présentés comme les candidats potentiels à la succession de Borudjerdi. Parmi ces quatre, se trouvait aussi le nom de Khomeini.
Originaire d’Azerbaïdjan, Shariatmadari était surtout connu des politiciens . Car il s’opposa fortement au mouvement des séparatistes d’Azerbaïdjan, après la Seconde Guerre mondiale. Il connaissait les pensées modernes et fréquentait certains intellectuels nationalistes. Golpayegani et Marashi Nadjafi, moins connus pour leurs activités politiques, avaient des idées traditionnelles.
Marashi Nadjafi était connu pour avoir fondé une grande bibliothèque à Qom. Il avait pour son intérêt à rassembler et entretenir des livres manuscrits. Etant donné sa maîtrise de l’histoire et de la littérature, il avait des relations avec des professeurs de ces disciplines. Mais Khomeini entretenait un statut différent
La mort de Broudjerdi provoqua une multitude de candidatures sur le sujet du Mardja’e des chiites. Certains comme le roi voulaient les installer hors d’Iran, en Iraq, mais la présence d’un bon nombre des Faqih à Qom était un véritable
Il était un juriste politicien qui avait joué un rôle important dans l’installation de Borudjerdi à Qom. Pourtant, il avait certaines divergences avec lui concernant des sujets tels que l’enseignement de la philosophie et le soutien au groupe Fedayin de l’islam. Khomeini était enseignant en philosophie et Borudjerdi était contre l’enseignement de philosophie à l’Ecole d’études théologiques.
Il semble que Khomeini soutenait les Fedayin de l’islam, groupe dirigé par Safavi[5] et fondé à la suite de l’assassinat de Kasravi[6], intellectuel iranien et partisan du sécularisme. Ce groupe assassina par la suite plusieurs gouverneurs et il joua donc un rôle important dans la politique du pays. Selon certains proches et élèves de Khomeini, celui-ci avait critiqué le rejet des Fedayin par Borudjerdi. Mais il ne les avait cependant jamais officiellement soutenus dans ses propos.
De plus, certains ont émis des doutes concernant son soutien aux Fedayin, car il était opposé à la lutte armée. Khomeini s’intéressait au mysticisme et au soufisme. Il connaissait les idées et la pensée d’Ibn Arabi, soufi certes connu, mais dont les religieux se défiaient.
Dans le domaine politique, Khomeini était partisan de Modaresse[7] et de Kashani[8], deux faqih qui ont donné leur accord au système du Parlementarisme. Modaresse était l’un des opposants de Reza Chah et perdit la vie pour cette raison. Kashani, pour sa part, soutint d’abord le régime de Reza Chah, puis s’en sépara. Il était l’un des compagnons de Mossadegh dans le mouvement de nationalisation du pétrole.
Le soutien de Khomeini à Kashani était si fort qu’il en arriva à s’opposer à Mossadegh. Il reprochait aux partisans de Mossadegh leur attitude à l’égard de Kashani. Khomeini qui était connu parmi le peuple pour ses cours d’éthique, avait cependant moins de chance d’être marja que les trois autres, à cause de ses idées et de son attitude.
Les tendances philosophiques et mystiques de Khomeini associées à sa position politique le différenciait des autres Faqih. Devenu tout de suite un religieux politicien, il gagna la faveur des jeunes étudiants qui lui apportèrent une réputation scientifique.
Ses élèves étaient plutôt des jeunes influencés par l’atmosphère politique d’après le coup d’Etat du 19 août 1953. Nous pouvons entre autres citer Montazeri[9] et Motahhari[10], deux célèbres élèves de Borudjerdi dont leur présence aux cours de Khomeini ajouta à sa crédibilité scientifique.
La multiplicité des marja de Qom et leurs divergences concernant l’évaluation de la situation sociale et l’idéologie du régime procura une occasion favorable pour le Chah de mettre en œuvre une politique de modernisation. Ali Amini, Premier ministre, se rendit à Qom pour tenter de convaincre les faqih de cette ville du bienfondé de la réforme agraire (future réforme royale) qui était le plus important sujet de divergence entre eux et le gouvernement.
Mais le principal obstacle pour Amini était le Chah qui désirait un politicien auprès de lui pour mettre en application sa politique de modernisation. Or Amini n’était pas un politicien. Son comportement indépendant rappelait les puissants premiers ministres tels qu’Ahmad Qavam et Mohammad Mossadegh. C’est pourquoi il ne fut pas longtemps en poste et Alam[11] le remplaça.
Alam était un fidèle de la famille royale, étant aussi le ministre à l’époque de Reza Chah. C’est ce dernier qui lui avait choisi une épouse et le domaine d’étude. Alam joua ainsi un rôle fondamental en tant que ministre de la Cour. Il eut en charge différents postes gouvernementaux. Leur application dans les affaires telles que l’organisation des élections visait les intérêts du Chah à renforcer le pouvoir. Il était considéré comme l’un de ses confidents.
De plus, en tant que secrétaire général du parti Mardom ( le peuple), il proposa certaines réformes économiques et sociales. Ces réformes firent plus tard une partie des principes de la Révolution blanche du Chah ( La réforme royale).
Au mois de juillet 1962, le Chah le chargea de former le gouvernement, en l’absence du Parlement, supprimé à l’époque d’Amini. Tout le monde s’attendait à ce que le Premier ministre organise les élections du Parlement. Mais Alam s’occupa des élections d’assemblées provinciales, régionales, de villes et de villages. Il avait l’intention de modifier la Charte qui aurait ouvert la modification de la Constitution. Ce qui semblait plus simple, en l’absence du Parlement. Mais le résultat était autre chose. Amini devint le sujet des critiques et des protestations de certaines personnes et de certains médias.
La mise en application des nouvelles politiques de modernisation du Chah (la réforme agraire), contestées par les religieux, ne dura pas longtemps. Le Chah remplaça son Premier ministre jugé maniable par un autre considéré comme plus obéissant. Alam, fidèle de la famille royale, prépara la scène pour une modification profonde de la Constitution. Il profita de la suppression du Parlement pour modifier la Charte. Deux principes firent scandale sur la scène politique. La première concerne la participation des femmes dans ces élections. Deuxième accordait le droit de prêter serment sur n’importe quel Livre saint.
Introduire des femmes dans ces élections et avoir le droit de prêter serment sur n’importe quel Livre saint et pas exclusivement sur le Coran révélèrent les véritables intentions du gouvernement.
La simultanéité de l’annonce de cette ratification avec la période de cérémonie du deuil de Fatima, la fille du Prophète, fut une occasion pour les faqih et les prêcheurs religieux d’attaquer le gouvernement. Cette critique s’étendit aux autres mesures concernant les politiques culturelles et sociales.
Les cérémonies religieuses dans différentes villes devinrent l’occasion d’attaquer le gouvernement. Les marja de Qom et de Machhad, deux villes religieuses d’Iran, firent part de leurs critiques et de leurs protestations au Premier ministre Alam en lui envoyant des télégrammes. Ce fut Khomeini qui eut la plus importante et la plus violente réaction.
Dans un télégramme au Premier ministre, il l’avertit à la fois de la nécessité de respecter la religion. Sinon la société religieuse de l’Iran réagirait contre les décisions allant à l’encontre de la religion. Donc ces dernières ne seraient jamais officielles. La protestation des religieux entraîna l’abandon par Alam de ses projets. Il déclara dans une lettre aux faqih que le gouvernement respectait la religion chiite. Cependant il faisait allusion aux minorités religieuses citées dans la Charte, protégées par le gouvernement islamique et dont les droits devaient être respectés.
Au début, Alam a informé les gouverneurs de l’annulation de la ratification des élections des associations régionales et provinciales. Mais il s’avéra que le gouvernement ne l’avait pas fait pratiquement. Car les médias et la radio, en particulier, n’en avaient pas fait part. Par ailleurs, une autre annonce du Premier Ministre aux présidents régionaux, bien que mentionnant la menace implicite des faqih de différentes régions, montre la ferme volonté du royaume de poursuivre sa politique, coûte que coûte. Le référendum, connus sous le terme de Révolution blanche en est la preuve.
La violente réaction de Khomeini et des autres Faqih entraîna le retrait par Alam de ses projets. Mais le gouvernement ne l’avait pas totalement abandonné. Au contraire, le conseil étatique montrait à ses présidents régionaux la ferme volonté du Shah et du Premier ministre de poursuivre cette politique.
Il s’agissait de la réforme agraire, de la nationalisation des usines, des forêts et des terres. D’une part, les faqih trouvaient que ces changements constituaient un danger pour la propriété privée et certains principes de la religion. D’autre part le référendum lui-même posait problème. Ils étaient d’avis que même la majorité des votes ne pouvait être une autorisation pour l’exécution des décisions non religieuses. Mais le 24 janvier 1962, le Chah déclara son opposition aux faqih dans une conférence à Qom. Ceux-ci ne l’avaient pas accueilli lors de son voyage dans cette ville religieuse et il les traita de réactionnaires noirs. Il les présenta même de pire façon que les réactionnaires rouges, c’est-à-dire les communistes en les considérant comme des pique-assiettes.
Les religieux contestaient la réforme agraire, la nationalisation des usines, des forêts et des terres. Pour eux, c’était d’une part un danger pour la propriété privée et certains principes religieux et d’autre part, le référendum lui-même posait problème.
Le 26 janvier 1962, le Shah organisa finalement le référendum. Bien que les rapports gouvernementaux aient annoncé le succès du référendum et que le peuple y était favorable, des inquiétudes se faisaient jour, liées aux protestations populaires du mois de Ramadan, mois très important pour les musulmans pendant lequel ils jeûnent pendant la journée. Alam conseilla aux présidents régionaux et aux préfets d’éviter les propos politiques dans les mosquées, d’arrêter les délinquants et de les transférer à Téhéran afin d’empêcher les protestations.
Au cours de l’histoire du chiisme, les jours religieux étaient une occasion importante pour les faqih chiites de mobiliser la population. En faisant le parallèle entre les événements contemporains et ceux des époques passées de l’islam, ils essayaient de préserver les préceptes religieux et de souder les fidèles. Finalement, la période du Ramadan se passa sans difficulté pour le Shah, mais à Norouz 21 mars 1963, il y eut des confrontations entre les faqih et la royauté.
Le deuxième jour du nouvel an, au 22 mars 1963, la fête nationale la plus importante des Iraniens, coïncida avec l’anniversaire du martyre d’Imam Sadegh[12].
A cause de la coïncidence de Norouz avec l’anniversaire du martyre de cet imam, les faqih interdirent de faire la fête cette année-là, ce qui provoqua l’attaque contre les religieux, commémorant le deuil, dans l’école Feyzie[13] par des partisans de la royauté. Golpayegani[14], faqih traditionaliste était l’organisateur de cette cérémonie. Les religieux traitèrent les attaquants de voyous, terme utilisé par le gouvernement pour parler des opposants révoltés. De nombreux récits ont été faits au sujet de cette attaque, du nombre de personnes tuées et des destructions, alors qu’un seul élève appelé Seyyed Younes Roudbari a été assassiné au cours de cette attaque.
Le Premier ministre Alam envoya un rapport aux agents gouvernementaux des différentes régions au sujet des troubles fomentés par des forces opposées au régime ce jour-là dans les villes de Machhad, Tabriz, Qom, Arak et Kachan. Il considérait que ce qui s’était passé à Feyzie était dû à la réaction des forces de police face à l’attaque des religieux contre la monarchie. Alam intima l’ordre aux agents gouvernementaux de surveiller et de punir les suspects afin que ce qui s’était passé à Qom ne puisse se répéter.
L’Attaque de l’école Feyzie rappelait celle des forces militaires à la mosquée de Gohar Shad à Mashhad. Ce qui détériora à jamais la relation entre celui-ci et les faqih. Cet événement créa une telle situation que les faqih s’opposèrent alors clairement au gouvernement et qu’ils parlèrent de la rébellion du gouvernement d’Alam contre les principes de la Charte, de la religion et des règles morales.
Le référendum eut lieu malgré les protestations massives du peuple. La coïncidence du deuil de l’Imam chiite aux fêtes de Nouvel An iranien changera la situation. La commémoration du deuil par les étudiants de l’école coranique de Qom s’ensuivit par l’attaque à leur encontre des partisans du Shah. S’achevant par plusieurs meurtres, cet événement fera des religieux les opposants non conciliables du Shah.
Mais Alam reprit en main la situation. Il ordonna aux employés du gouvernement d’enfermer et d’exiler les adversaires. En revanche, dans la littérature des opposants religieux, l’événement de Feyzie était devenu un prétexte pour attaquer le royaume des Pahlavi.
En envoyant des émissaires chez les faqih d’autres régions, Khomeini leur demanda de rappeler l’attaque de Feyzie aux fidèles et de ne pas oublier de commémorer ce deuil par les chants de rowza pendant les jours de deuil de Muharram. Dans la religion chiite, le rowza ,les prêcheurs chantent pour commémorer le martyre d’Hosseinet pendant la bataille de Karbala.
L’arrivée du mois de Muharram pendant lequel les cérémonies de deuil d’Hossein ibn Ali sont organisées, accrurent les inquiétudes du gouvernement. Au cours de l’histoire chiite, ces jours étaient une occasion pour relier les événements de l’époque au soulèvement d’Hossein contre les Omeyades. C’est pour cette raison que les préfets et les gouverneurs menacèrent les faqih des régions de violentes condamnations s’ils incitaient les gens à manifester. Les rapports gouvernementaux montrent que Khomeini était soutenu par les faqih des villes et certaines déclarations furent également publiées à ce sujet.
Dans une telle situation, le gouvernement d’Alam ordonna aux prêcheurs et aux organisateurs des cérémonies de deuil de Muharram de prendre l’engagement de ne pas créer la moindre perturbation lors des cérémonies, sous peine d’être emprisonnés et punis. Il fut également convenu que les mosquées et les lieux de deuil, soient contrôlés par les forces militaires. Les deux jours de Tassua et d’Achoura se passèrent dans une tranquillité relative. La révolte principale allait naître à Qom.
Les religieux dont le nouveau leader est Khomeini parlent clairement d’une rébellion contre le Shah. Plusieurs opposants seront arrêtés et emprisonnés. Les événements du mois du deuil chiite (Muharram et l’histoire du martyr Hossein) ne changèrent pas grand-chose. Les menaces étatiques accompagnées de violentes condamnations se finirent par un contrôle extrême des mosquées dans les autres villes que Qom.
À l’occasion du jour de l’Achoura, le 3 juin 1963, Khomeini fit une discours à l’école Feyzie. dans son discours, il attaqua le Chah. Alors que jusqu’à présent, les faqih critiquaient le gouvernement et le Premier ministre, mais pas le roi. Au cours de ce discours, il avertit Mohammad Reza Chah qu’il aurait le même destin que celui de son père Reza Chah s’il n’écoutait pas les avis du clergé.
D’ailleurs pour Khomeini c’était certain que le Chah avait ordonné l’attaque de l’école Feyzie. Il lui interdit d’entrer en relation avec Israël. Il pensait que le Chah avait été influencé par les Bahaïs pour ses réformes culturelles et sociales. En plus, il affirma que l’islam était en danger et il demandait l’aide de la population et des faqih.
Le discours Khomeini a été un moment décisif dans les relations entre le clergé et la royauté. Le Shah qui, en tant que roi chiite, était considéré selon la Charte constitutionnelle comme protecteur de cette religion, fut condamné par un faqih chiite pour n’avoir pas respecté son engagement.
Un retentissant discours de Khomeini accusa le Shah de ne pas respecter la religion. Khomeini lui prévit le même destin que son père. Selon lui, la relation avec Israël, les réformes culturelles et sociales ont été inscrites par les Bahaïs.
De plus, selon la Charte, article cinq, les faqih devaient contrôler les lois afin qu’elles ne soient pas contraires à la religion. Bien que cet article ait été en vigueur uniquement pendant les premières années, les faqih n’avaient jamais rejeté une seule loi au prétexte qu’elle était en contradiction avec la religion. Mais maintenant Khomeini condamnait le Shah car il luttait contre l’islam et il promulguait des lois illégitimes, grâce au soutien du royaume.
Le soir de l’Achoura, une vague de propos anti-gouvernementaux se propagea dans les villes. Beaucoup de prêcheurs religieux et même de marja dans différentes villes, spécialement à Téhéran, furent arrêtés. Le régime a arrêté Khomeini à Qom, Tabatabaii Qomi[15] à Mashhad et Mahalati[16] à Chiraz . Il les avait emprisonné pour avoir incité les gens à la révolte.
Informés de l’arrestation de ces 3 personnes, les gens réagirent vigoureusement. Au 5 juin 1963, quelques manifestants se réunirent dans différentes villes, en particulier à Téhéran et à Qom. Même Behbahani[17], célèbre faqih de Téhéran, fils de Seyyed Abdullah Behbahani, l’un des dirigeants constitutionnels qui avait soutenu le roi lors de ses divergences avec Mossadegh, était parmi les protestataires.
Le gouvernement d’Alam prétendit que les troubles avaient été fomentés de l’étranger, en particulier par le gouvernement égyptien[18]. Il fut dit qu’Abdul Gheisse Joujou qui avait l’intention de donner de l’argent aux protestataires avait été arrêté à l’aéroport. Mais les protestations étaient si nombreuses qu’il était illogique que la force et l’argent des étrangers en soient la cause. Les cinémas, les cabarets, les discothèques, la radio et les lieux gouvernementaux, en tant que symboles culturels et politiques du gouvernement devinrent la cible des attaques.
L’arrestation de Khomeini et deux autres Faqih célèbres provoqua de nouvelles protestations dans les autres villes. Les cinémas, les cabarets, les discothèques, la radiodiffusion et les lieux gouvernementaux, en tant que symboles culturels et politiques du gouvernement, devinrent la cible des attaques. Mais le Premiers ministre accusa les opposants d’avoir touché de l’argent des pays étrangers, spécialement l’Egypte.
Les arrestations du 5 juin 1963, touchèrent aussi d’autres groupes de la société surtout les Loutis[19]. Tayeb Hadjrezaii a été le plus important Louti arrêté lors des manifestations du 5 juin 1963. Partisan du Shah dans l’opération Ajax (Coup d’état anglo-américain de 1953), il avait dirigé, ce jour-là, la racaille du sud de la ville. Ce soutien lui valut une médaille du parti royaliste Rastakhiz. Mais la séparation des Loutis du royaume des Pahlavi était prévisible.
Les Loutis appartenaient à la société traditionnelle. Ils n’avaient aucune place dans la société moderne où seules les forces militaires et de police sont chargées d’assurer la sécurité et de défendre le gouvernement, d’autant plus qu’eux-mêmes perturbaient l’ordre et la sécurité. Les Loutis avaient des conseils religieux et étaient particulièrement actifs pendant le mois de deuil de Muharram.
Le jour de l’Achoura juin 1963, Téhéran était sous le contrôle de groupes de manifestants en deuil, échauffés par les Loutis. Le 5 juin 1963, ces derniers avaient également commis des violences lors de leurs cortèges. Ils avaient mis le feu à des voitures de police et à des magasins.
L’exécution du représentant des Loutis, une classe sociale pro-traditionnelle et religieuse, les incitèrent à se joindre au clergé. Khomeini arrêté et emprisonné sera soutenu par les autres Faqih. Reconnu par ceux-ci comme « marja e-taqlid», il fut emprisonné dans un lieu privé où le gouvernement contrôlait ses relations.
C’est pourquoi il était nécessaire qu’outre les faqih et les prêcheurs religieux, les Loutis soient également punis. Car ils n’avaient pas leur place dans la société moderne voulue par le Chah. Tayeb, leur représentant, constituait un bon appât. Son arrestation et son exécution firent que les Loutis se trouvèrent isolés dans un premier temps. Ensuite, ils se joignirent au clergé.
La mise à l’écart et la libération de Khomeini n’étaient pas si simples à réaliser. Les faqih de différentes régions d’Iran vinrent à Téhéran, ils occupèrent l’espace autour du tombeau d’Abdol Azim Hassani, célèbre lieu saint au sud de Téhéran, pour protester contre l’arrestation de Khomeini, Qomi et Mahalati.
Dans la littérature religieuse, cette action des faqih est appelée émigration, en souvenir de celle du Prophète de la Mecque à Médine pour échapper à ses adversaires. Pendant le règne de Mozafaredin Shah qadjar, les faqih avaient déjà recouru à un tel procédé pour atteindre leurs buts, ce qui causa la Révolution constitutionnelle.
Mohammad Reza Chah qui considérait qu’il était un roi constitutionnel avait, par ses décisions, contraint les faqih à utiliser les mêmes méthodes sous un régime despotique. Le gouvernement d’Alam essaya d’empêcher certains faqih de se joindre à ce mouvement. En confirmant Khomeini comme marja e-taqlid, les faqih reconnaissaient que ses démarches et ses propos correspondaient à ce que la Charte entendait par devoir. Après avoir passé une période enfermé dans la prison d’Echratabad, Savak l’a transféré chez l’un des commerçants religieux. C’est ce qu’on appelle la période de confinement au cours de laquelle Chah contrôlait ses relations .
Les membres du groupe politico-religieux Nehzat-e Azadi (Mouvement de libération de l’Iran), dirigé par l’ingénieur Mehdi Bazargan furent condamnés par le tribunal militaire au cours de cette période. Bazargan et ses compagnons qui formaient une branche du Front National se revendiquaient comme musulmans, iraniens et partisans de Mossadegh.
Ils acceptaient l’islam en tant qu’outil de combat dans l’action politique. Ainsi leur point de vue contredisait celui des partis de gauche et les laïcs nationaux. Faisant partie des étudiants envoyés en France à l’époque de Reza Chah, Il avait fait des études d’ingénieur en France. Bazargan enseigna à la Faculté polytechnique de l’Université de Téhéran après son retour en Iran.
Il trouvait conciliables la démocratie occidentale et les enseignements. Condamnant le despotisme, lors de la nationalisation du pétrole, Bazargan s’est chargé de la délégation iranienne qui négocia pour exclure les anglais
Bazargan, le leader des opposants qui faisaient partie de Nehzat-e Azadi trouvant conciliables la démocratie occidentale et les enseignements de l’Islam, condamnait le despotisme. Condamné à la prison, il prononça un important discours: « Nous sommes le dernier groupe qui vous parle en respectant la loi, ce ne sera pas la langue de la génération suivante ».
Il connut la prison après l’opération Ajax . Ensuite, Bazargan se sépara peu à peu du Front National en fondant Nehzat-e Azadi avec Taleghani, un faqih politique et le docteur Sahabi, professeur d’université. Bazargan et les membres du Mouvement de libération qui croyaient à la lutte parlementaire et aux réformes, ont joué un rôle décisif dans l’opposition au régime royal. Au tribunal, Bazargan s’adressa au Chah et lui dit : « Nous sommes le dernier groupe qui vous parle en respectant la loi, ce ne sera pas la langue de la génération suivante ».
Lors de ces évènements, Hassan Ali Mansour[20] remplaça Alam comme Premier ministre. Son père Radjab Ali Mansour avait participé au gouvernement de Reza Shah et au début du règne de Chah. Mansour était proche des États-Unis et il avait rassemblé ses amis partageant les mêmes idées que lui, au sein du parti Iran Novin (l’Iran moderne) pour prendre en main le gouvernement.
Ils étaient critiqués par les vieux politiciens comme Alam. C’était le soutien des États-Unis en faveur Alam qui incita Mohammad Reza Chah à le choisir comme Premier ministre. En adoptant des méthodes pacifiques, Mansour essaya de se démarquer d’Alam. Il mit fin au confinement de Khomeini et envoya son ministre de l’intérieur, Javad Sadr qui était d’une famille religieuse, pour le visiter.
Les bonnes relations entre le gouvernement de Mansour et Khomeini ne durèrent pas longtemps. La loi de la Capitulation en fut la cause. Comme Mansour avait de bonnes relations avec les États-Unis, les consuls militaires américains acquirent comme les diplomates, l’immunité judiciaire en Iran.
Les adversaires trouvèrent que cela était une véritable résurgence de la Capitulation de l’époque des Qadjar. Il faut noter que celle-ci signée avec les Russes à l’époque de Fath Ali Shah, lors du traité de Turkmanchai. Elle concernait les citoyens de tous les pays ayant des relations politiques avec l’Iran.
La Capitulation avait été annulée sous le règne de Reza Chah à la suite de certaines réformes juridiques. La France a été le premier pays à volontairement annuler la Capitulation s’appliquant à ses ressortissants en Iran. L’immunité judiciaire des militaires américains fut cependant considérée comme la réanimation de la Capitulation. Khomeini attaqua le gouvernement dans un prêche à la grande mosquée de la ville de Qom. Selon lui, cette nouvelle convention insultait la dignité des Iraniens. Il était d’avis que cette loi donnait plus de valeur à un cuisinier américain qu’à un marja-e taqlid iranien.
Le gouvernement de Mansour réagit violemment à cette conférence. La nuit du 4 novembre 1964, les agents de sécurité vinrent chercher Khomeini dans sa maison à Téhéran. Tout de suite, ils l’exilèrent en Turquie. La Turquie étant un pays laïc, l’exil d’un faqih chiite signifiait l’isolement total. Durant leur exil en Turquie, Khomeini et son fils furent obligés d’abandonner leurs habits religieux.
Les partisans de l’Ayatollah réagirent à son exil différemment de ceux de l’époque du Premier ministre Alam. Une formation politique islamique appelée Motalefe dont certains membres avaient fait partie des Fedayin de l’islam, assassinèrent Hassan Ali Mansour devant le bâtiment du Parlement national sur la place Baharestan.
Le 23 janvier 1964, Hassan Ali Mansour décéda des suites de ses blessures. Amir Abbas Hoveida, son ami intime et son ministre des Finances lui succéda. Il fut Premier ministre pendant 13 ans, bien qu’au départ il ait été prévu qu’il le remplacerait temporairement.
Quelques mois après l’assassinat de Mansour, au mois de mars 1965, le Chah fut la cible d’un assassinat raté dans le palais de marbre. Reza Chams Abadi, membre de la Garde impériale et chargé de l’entretien de la Cour l’avait perpétré. Asassiné par la suite, les traces de ses balles contre le Shah ont été conservées sur le mur du palais.
Un groupe religieux appelé « Parti des nations islamiques » formé pour la lutte armée et l’instauration d’un gouvernement islamique et dirigé par Bodjnourdi fut fondé la même année. Moussavi Bodjnourdi était le fils de l’un des faqih de Nadjaf. Le régime a condamné les membres du groupe à l’emprisonnement à vie ou pour de longues périodes.Le nouveau Premier ministre Mansour essaya de concilier les relations de la Cour avec les Faqih. Mais la loi de la Capitulation en faveur des Américains avec qui il tenait de bonnes relations lui couta chère. Les opposants ont trouvé l’immunité judiciaire des militaires américains comme la réanimation de la Capitulation des Russes et des Français à l’époque Qadjar.
Khomeini attaqua de nouveau le gouvernement. La réaction de l’Etat sera violente. Donc, Khomeini fut arrêté, exilé en Turquie ensuite en Iraq avec son fils. Tous les ont été deux obligés d’abandonner leurs habits religieux. L’assassinat raté du Shah dans le palais de marbre déclencha la lutte armée. L’auteur était membre d’un nouveau mouvement politique et religieux qui cherchait l’instauration d’un gouvernement islamique.
La formation de groupes armés marxistes comme l’Organisation des moudjahidines du peuple, issu du Mouvement de Libération de l’Iran, ainsi que la guérilla fedayin du peuple iranien issue du parti Tudeh montre la justesse des prévisions de Bazargan au sujet des luttes politiques en Iran.
Mais certains, comme Morteza Motahari et le docteur Ali Shariati, croyaient à l’influence de l’intelligence et de la culture. L’Hosseynie Ershad était le lieu le plus important où ils se groupaient, accueillant le discours sur l’islam révolutionnaire d’avant-garde.
Shariati théorisa certains concepts tels que l’imamat, la justice, le martyre et le djihad (lutte pour Dieu) et il mit au point le discours de la Révolution islamique. Mais il y eut ensuite des désaccords internes, à cause de divergences entre Motahhari et Shariati. Les problèmes qui en résultèrent se poursuivirent même après la victoire de la Révolution.
D’autre part, il y avait d’autres opposants tels Sharati et Motahari qui croyaient à l’influence de l’intelligence et de la culture. Shariati théorisa certains concepts tels que l’imamat, la justice, le martyre et le djihad (lutte pour Dieu) en mettant au point le discours de la Révolution islamique.
Khomeini fut exilé en Iraq 13 mois après son séjour en Turquie. Selon certains experts du gouvernement iranien, la situation en Iraq était plus favorable à l’exil de Khomeini. Car, la présence de nombreux faqih qui n’avaient pas les mêmes idées politiques que Khomeini et qui préféraient collaborer avec le régime royal chiite en Iran à un avenir incertain, constituait un argument important pour le Chah qui luttait contre ce faqih protestataire.
Peu de temps après l’arrivée de Khomeini à Nadjaf, beaucoup de ses jeunes élèves iraniens le rejoignirent. Les activités politiques de Khomeini en Iraq se limitèrent à donner des cours. Mais en 1970, il reprend et amplifie le Velayat-e faqih, concept juridico-politique, qui établit les règles d’un gouvernement islamique. Désormais, ses cours lui permettent d’exposer ses idées. Ce qui montre sa volonté de mettre en œuvre, dans le futur, ce nouveau mode de gouvernance.
Exilé en Iraq dont la situation était plus favorable à cause de la présence de nombreux Faqih, Khomeini en profita. Beaucoup de ses jeunes élèves iraniens le rejoignirent. Les activités politiques de Khomeini en Iraq se limitèrent à donner des cours. En 1970, il reprend et amplifie le Velayat-e faqih, concept juridico-politique, qui établit les règles d’un gouvernement islamique.
Malgré les nombreux adversaires politiques du gouvernement Pahlavi: gauchistes, nationalistes et religieux, la Savak, l’agence de sécurité du gouvernement, considérait que seuls les gauchistes constituaient le principal danger. Elle considérait que les adversaires religieux étaient surtout des marxistes islamistes, connus sous le nom de Moudjahiddines du peuple.
Un sondage gouvernemental dans les années 50 prouvait l’importance de la religion dans la société iranienne qui se positionnait contre la politique de modernisation du Chah. D’autre part, le Shah et la Savak pensaient que l’idéologie marxiste était dominante chez leurs adversaires. Certes, l’emprisonnement des religieux les avait fait pencher vers les gauchistes.
C’est pourquoi l’exil des adversaires religieux dans les régions sunnites était la solution du gouvernement pour les éloigner des partis de gauche, solution qui provoqua d’autre part le rapprochement des faqih politiques chiites avec les faqih et les groupes sunnites des zones frontalières.
La police secrète de Chah n’accordait d’importance qu’aux opposants marxistes religieux : les Moudjahidines (Les Combattants du Peuple). L’emprisonnement des religieux les avait fait pencher vers les gauchistes. C’est pourquoi l’exil des adversaires religieux dans les régions sunnites était la solution du gouvernement pour les éloigner des partis de gauche, solution qui provoqua d’autre part le rapprochement des Faqih politiques chiites avec les Faqih et les groupes sunnites des zones frontalières.
Les décisions prises par le Shah ne firent que précipiter le pays vers la Révolution. Par exemple, l’organisation de fêtes impériales dispendieuses à l’occasion de la 2 500ème année du régime royal ou encore la fête artistique de Chiraz attisèrent les oppositions. Car elles allaient à l’encontre des coutumes et de la religion.
La création par le Shah du parti monarchiste Rastakhiz et l’obligation d’y adhérer pour tout Iranien ne fit qu’empirer les choses. Quand le souverain déclara que quiconque ne deviendrait pas membre de ce parti n’aurait qu’à récupérer son passeport et quitter le pays, cela apparut comme un moyen de stigmatiser les personnes qui pensaient différemment. Ces décisions sortirent peu à peu Khomeini de l’isolement de Nadjaf. Il prit alors en main la direction du courant s’opposant à ces mesures.
Malgré le conflit intérieur, le Chah prit des décisions qui allaient précipiter le pays vers la Révolution. Ce sont les fêtes de la 2 500ème année du régime royal et la fête artistique de Chiraz. La création par le Chah du parti monarchiste Rastakhiz et l’obligation d’y adhérer pour tout Iranien ne fit qu’empirer les choses. Khomeini revint sur la politique et prit alors en main la direction du courant s’opposant à ces mesures.
Mehdi Bazargan, pour sa part, était d’avis que le Shah et Khomeini, chacun à leur façon, étaient tous deux les guides de la Révolution. Le Chah, par ses décisions, augmentait les mécontentements, alors que Khomeini profitait de ses erreurs pour atteindre son but.
Comme l’insatisfaction grandissait, Chah a renvoyé Hoveyda en tant que Premier ministre (7 août 1977). Il l’ transféré au ministère de la Cour. Ce qui prouvait que les changements étaient minimes. C’est Jamshid Amouzegar, l’un des ministres d’Hoveyda, qui lui succéda en tant que Premier ministre. Alors qu’il était confronté à une organisation économique inefficace et à l’augmentation de l’inflation, les problèmes politiques s’ajoutèrent à ses difficultés. Le fils de Khomeini a décédé à Nadjaf au mois d’Avril 1978.
Le nom de Khomeini qui avait été censuré pendant toutes ces années, apparut, à cause de cet évènement, dans les assemblées politiques et religieuses de l’Iran. Le décès soudain de Seyyed Mostafa suscita des rumeurs, on parla d’un assassinat par la Savak. L’organisation de cérémonies commémoratives au cours d’une desquelles le conférencier, Hassan Rohani, (actuel président de l’Iran), utilisa le titre d’imam pour désigner Khomeini montrait la place de Khomeini en Iran.
Imam est le titre que les chiites utilisent pour Ali ibn Abi Talib et ses 11 descendants, successeurs du Prophète. Selon les chiites, ces 12 personnes sont les seuls dignes d’être les successeurs du Prophète et de prendre en main la gouvernance de la société.
La réaction du gouvernement du Chah Pahlavi fut la publication d’un article dans le journal Ettelaat maudissant l’Ayatollah Khomeini. Ali Chabani, l’auteur de cet article, travaillait au ministère de la Cour. Il prétendait que l’Ayatollah était en fait originaire d’Inde.Ppar conséquent, il connaissait Khomeini comme l’un des suppôts de l’Angleterre. L’article cherchait ainsi à prouver les interventions des étrangers en Iran via des contestations de Khomeini.
Quelques changements minimes comme le renvoi du Premier ministre Hoveyda ne changèrent rien. Les problèmes économiques comme l’augmentation de l’inflation et aussi la mort du fils de Khomeini créèrent une situation instable en avril 1978. Il reçut tout de suite le titre d’Imam, ce qui montrait le statut important de Khomeini dans la société iranienne. Mais la réaction médiatisée du Shah, en publiant un article contre Khomeini fit l’effet d’un boumerang.
La publication de cet article causa une réaction vigoureuse de l’Ecole d’études théologiques de Qom le 9 janvier 1978. Le régime a réprimé des manifestations de protestation à Qom. Ce qui fut le début d’une série de rassemblements intitulés du « quarantième jour » dans différentes villes.
Dans la culture religieuse des Iraniens, les cérémonies de commémoration qui sont organisées au 40 ème jour après un décès, s’appelle Arbaïn. Ces cérémonies du quarantième ou d’Arbaïn font référence à l’Arbaïn de l’imam Hossein. C’est l’un des symboles de l’identité chiite, pendant lequel les chiites vont en pèlerinage au tombeau d’Hossein ibn Ali. Les habitants de Tabriz avaient alors organisé un rassemblement de protestation le quarantième jour de la répression de Qom, lui aussi réprimé.
Il s’ensuivit le 9 janvier 1978 une réaction vigoureuse de l’Ecole d’études théologiques de Qom, dont les manifestations de protestation furent durement réprimées. Les protestations débutèrent à Tabriz, à Yazd et dans les autres grandes villes.
La population de Yazd manifesta également à l’occasion du quarantième jour de Tabriz. Les rassemblements se multiplièrent et eurent lieu également dans les petites villes. Le mouvement de protestation devenait national. Les institutions politico-religieuses profitèrent d’occasions religieuses telles que les mois de Muharram et de Ramadan pour faire connaître leur opposition au régime royal.
Plus les opposants devenaient actifs dans le pays, plus Khomeini se sentait sous contrôle. A cause du rapprochement des gouvernements de l’Iran et de l’Iraq, l’obligea à quitter l’Iraq. Koweït devait être sa première destination. Mais l’interdiction du gouvernement de ce pays le mena en France. C’est un pays occidental dans lequel le séjour d’un faqih chiite était inattendu.
Le Chah s’imaginait que l’Occident mettrait à l’isolement de Khomeini mais ce n’était pas tout. Car Khomeini et ses conseillers profitèrent de la liberté en France. Ils ont pu faire connaître leurs idées et leurs objectifs, publiquement, au monde entier.
Le séjour de Khomeini dans le village de Neauphle-le-Château rendit célèbre ce village dans les médias du monde. Les opposants politiques au Shah qui étaient plutôt des étudiants vinrent en France. En fondant le Conseil de la Révolution dont la liste des membres était secrète, Khomeini établit le programme pour l’avenir.
Durant son exil, Khomeini recevra le « soutien résolu » de François Mitterrand, chef du Parti socialiste français. Celui-ci enverra une délégation à Téhéran après la victoire révolutionnaire. Khomeini reçut également le soutien de nombreux intellectuels, comme Michel Foucault. Celui-ci se rendra en Iran à deux reprises avant la révolution, aux mois de septembre et novembre 1978. Ensuite, Il rencontrera aussi Khomeini dans son domicile français. Simone de Beauvoir et Jean-Paul Sartre aussi se rendront à Téhéran en 1980, répondant à l’invitation de la nouvelle République. D’autre part, le rédacteur en chef du journal « Le Monde », André Fontaine, comparera Khomeini à Jean-Paul II dans un article intitulé « Le retour du divin », daté du 2 février 1979.
Mais la présence en France de Khomeini suscita aussi des interrogations plus politiques, voire stratégiques. Chah refusera l’expulsion de Khomeini, venu en France avec un visa de tourisme, préférant le savoir éloigné de l’Iran. Il refusera de même, selon les informations d’Alexandre de Marenches, à l’époque chef du SDECE, les services secrets français, la proposition du Ministre de l’Intérieur français, Michel Poniatowski, envoyé par le Président Valéry Giscard d’Estaing, d’éliminer physiquement Khomeini.
Les contrôles s’accentuant en Iraq, Khomeini part s’installer en France, dans le village de Neauphle-le-Château. Profitant de la liberté française, il devint très célèbre et fonda le Conseil de la Révolution.
Plus l’influence heureuse de Khomeini augmentait, plus la domination de Mohammad Reza Shah déclinait. Son cancer dont seuls ses médecins français étaient informés l’avait rendu indécis. La perspective de sa mort le perturbait et il se souciait de l’avenir de son successeur.
C’est pourquoi deux jours après la répression des manifestations du 4 novembre 1979 des élèves et des étudiants devant l’Université de Téhéran, Chah dit qu’il entendait les messages envoyés par la Révolution des Iraniens, lors d’une conférence radio-télévisée. Il promit de faire des réformes et de lutter contre la corruption. Les observateurs furent d’avis que cette conférence avait amoindri sa dignité d’homme d’Etat.
Plus l’influence heureuse de Khomeini augmentait, plus la domination de Mohammad Reza Shah déclinait. Deux jours après la répression, Chah a lancé un discours. Il a dit lors d’une conférence radio-télévisée qu’il entendait les messages envoyés par la Révolution des Iraniens. Il promit de faire des réformes et de lutter contre la corruption.
Ensuite, il décida de choisir, à la stupéfaction générale, un militaire comme Premier ministre. Alors que tout le monde s’attendait que ce soit Gholam- Ali Oveysi, militaire ferme au caractère bien trempé, le Chah nomma Gholam- Reza Azhari, militaire très différent d’Oveysi, comme Premier ministre. Lui non plus ne put trouver de solution à cette crise touchant le royaume des Pahlavi.
Finalement, il fut remplacé par Chapour Bakhtiar. Bakhtiar était l’un des membres du Front National et l’un des partisans de Mossadegh. Ainsi Bakhtiar qui avait passé une partie de sa vie en France, devient le dernier Premier ministre de Chah.
L’acceptation de ce poste provoqua son exclusion du Front National. Bakhtiar quitta l’Iran après l’effondrement du régime royal et fut assassiné après plusieurs années passées en France. Il fut une solution tardive et inefficace. Car la société iranienne s’était engagée dans un processus révolutionnaire et les réformes n’étaient plus possibles.
Les changements de Premiers ministres, et même le retour vers l’ancien opposant Chapour Bakhtiar, n’apportèrent au Shah aucun succès . Après le départ du Chah le 16 janvier 1979, Khomeini décida de revenir en Iran le 1er février 1979. En déclarant finalement l’impartialité de l’armée le 11 février 1979, la monarchie s’effondra en Iran. Une nouvelle période commença dans l’histoire de ce pays.
Après que le Chah ait quitté le pays 16 janvier 1979, Khomeini décida de revenir en Iran. Après son retour le 1 février 1979, il choisit Mehdi Bazargan comme chef du gouvernement temporaire. Le cours de l’histoire n’allait pas dans le sens d’un système monarchique. Finalement, en déclarant l’impartialité de l’armée le 11 février 1979, la monarchie s’effondra en Iran. Une nouvelle période commença dans l’histoire de ce pays.
[1] Seyyed Hossein Tabatabai Borudjerdi, marja-e taqlid chiite, ce qui littéralement signifie « source d’imitation », mais aussi faqih, c’est-à-dire juriste éminent, qui possédait la plus haute autorité.
[2] Mohammad Taghi Falsafi
[3] Seyyed Mohsen al-Hakim
[4] Kazéme Chariatmadari, Seyed Mohammad Reza Golpayégani, Seyed Chahabaldine Marachi Nadjafi et Seyed Rouhollah Khomeiny
[5] Seyyed Mojtaba Navab Safavi
[6] Ahmad Kasravi
[7] Seyyed Hassan Modaresse
[8] Abolghasem Kashani
[9] Hossein Ali Montazeri
[10] Morteza Motahhari
[11] Amir Asadollah Alam, Amir Asadollah, fils de Mohammad Ebrahim Chokatalmolk Alam
[12] 6e imam des chiites. Cet imam joua un rôle important dans l’établissement de la jurisprudence chiite. Les chiites duodécimains le considèrent comme leur chef. Ils se présentent même comme des chiites Jaafari. C’est la raison pour laquelle le jour de son anniversaire est le jour religieux le plus symbolique des chiites. Car les faqih chiites se considèrent comme ses héritiers.
[13] L’école Coranique de Qom
[14] L’Ayatollah Seyyed Mohammad Reza Golpayegani
[15] Seyyed Hassan Tabatabaii Qomi
[16] l’Ayatollah Cheikh Bahaldine Mahalati
[17] Seyyed Mohammad Behbahani
[18] Gamal Abdel Nasser Hussein
[19] Les Loutis font partie des forces marginales de la société iranienne. Ainsi, Ils se présentent comme de braves gens, mais en fait, ils ne respectent pas certaines règles religieuses ou morales. De sorte qu’ils sont parfois connus comme des voyous dans la littérature officielle. Des groupes de gauche iraniens les ont appelés lumpen, en référence à l’expression « Lumpenprolétariat » de Marx.
[20] Hassan Ali Mansour