Cham est simplement le nom d’un village aux alentours de Yazd. Un village où n’habitent que 27 zoroastriens. La vie calme et la pratique du zoroastrisme firent de ce lieu un village de charme. Une balade un après-midi pour assister au coucher du soleil au pied de la colline où se dressent les tours de silence restera une image inoubliable chez les voyageurs qui ont visité Cham.
Il est évident qu’en visitant Cham, nous évoquerons le zoroastrisme. Un thème particulier qui nécessite un article à part. En ce qui concerne Cham, il faut souligner que le zoroastrisme n’est pas seulement une religion. C’est un des symboles nationaux les plus réputés chez les Iraniens. Avant l’arrivée de l’islam en Iran, il était la religion officielle de l’empire perse sassanides (224-651 après J.C) et celle de la majorité des habitants. Après l’invasion des Arabes et l’effondrement de la dynastie sassanide, le zoroastrisme est devenu marginal face à la religion des conquérants.
Un groupe important de riches zoroastriens choisit alors d’émigrer et de s’installer dans d’autres pays. Ainsi, certains choisissent l’Inde (connu dans le monde entier sous le nom des Parsi à Bombé). Les autres, restant en Iran, sous les états islamiques. Donc, ils se convertirent à la nouvelle religion (Islam) par conviction ou par nécessité (obligation). Un nombre limité d’adeptes ne voulait quitter ni son pays ni sa religion. Ils se regroupèrent dans quelques coins du pays, majoritairement dans le désert de Yazd ou à Kerman. Leurs descendants sont les héritiers du culte ancestral des Perses. En tant que gardiens de la tradition nationale préislamique de l’Iran, ils ont conservé l’intégralité de leur communauté. L’une des sociétés zoroastriennes les plus originales se trouve aux alentours de Yazd dans un village nommé Cham.
On peut affirmer que la Perse et maintenant l’Iran a un lien indéfectible, à nul autre pareil, avec Zoroastre. A tel point que lorsqu’on parle de l’Iran, immédiatement, on évoque en premier Zoroastre. Il existe peu d’informations historiques sur la vie de ce dernier .
Il n’y a pas d’unanimité sur sa date de naissance, entre 1200 et 1000, même 600 avant Jésus-Christ, ni à propos de son lieu de naissance: l’Azerbaïdjan, Rey ou le Khorasan. Avant Zoroastre, les Iraniens n’avaient pas de religion acceptée par tous. Ils adoraient des dieux ou des déesses comme Mazda, Mitra, Anahita, Verethraghna (dieu de la guerre : Mars)… Zoroastre est devenu le messager de la solidarité et il prôna un Dieu unique. Après Zoroastre, Ahura Mazda, considéré jusqu’alors comme le dieu de l’intelligence, de la pensée et de la justice, est devenu le Dieu unique.
Bien que souvent la prononciation du mot « Perse préislamique »évoque le Zoroastrisme, ce culte ancien des Iraniens n’a jamais été supprimé de la vie sociale et religieuse en Iran. Etant en minorité, les zoroastriens vivent encore en Iran. Le culte du feu se pratique dans quelques temples du feu, dispersés dans le pays.
La pensée et la mission de Zoroastre se fonde sur l’unité du monde, d’un point de vue théorique, et sur la bonté d’un point de vue pragmatique. Son enseignement se résume dans la formule «bonnes pensées, bonnes paroles et bonnes actions» qui synthétise les préceptes de sa religion, ce qui était une grande révolution dans le domaine de la pensée humaine. Quelle autre pensée pouvait s’opposer à celle de Zoroastre? C’est la raison pour laquelle son idéologie se répandit en Iran très rapidement.
Zoroastre fut tué, à l’âge de 77 ans, par un de ses ennemis alors qu’il était en train de louer Dieu. Mais sa mort ne signifia aucunement la disparition de sa religion. La politique des rois iraniens sous les Achéménides (550-330 av J.C.) et les Parthes (248 av J.C – 224 ap J.C.) était basée sur la tolérance et l’indulgence envers les diverses croyances. Ils estimaient toutes les religions et ne combattaient aucune d’elles.
C’est pourquoi, sous ces deux dynasties, l’Iran était dépourvu de religion officielle. Les sources historiques montrent que le zoroastrisme était répandu dans tout le territoire iranien et les pensées de Zoroastre rassemblaient de plus en plus d’adeptes. En 224, le zoroastrisme bénéficia de circonstances particulièrement favorables. En effet, une dynastie zoroastrienne, descendante des mages, accéda au pouvoir, il s’agissait des Sassanides.
Le Zoroastrisme est le culte ancien des Iraniens dans la période préislamique. Il remonte au deuxième millénaire avant Jésus-Christ. Messager de la bonne pensée, il est fondé sur l’unité de Dieu. La religion officielle de l’empire perse Sassanides, sera remplacée par l’Islam des arabo-musulmans qui allait établir un nouvel état avec une nouvelle religion.
Ils décidèrent que le zoroastrisme serait la religion officielle et, pendant les quatre siècles de leur règne, ils la propagèrent dans tout l’empire perse. Cette religion se répandit d’est en ouest et du nord au sud du pays. C’est ainsi que les feux sacrés allumés dans les temples du feu brûlèrent de la Mésopotamie jusqu’à la Transoxiane et les mages protégeaient ce culte.
Il faut noter que ce lien entre religion et Etat n’était pas exempt de dangers. Cette dépendance réciproque entre la religion et le gouvernement créait une relation profonde entre eux, de sorte que l’existence de l’un était conditionnée par celle de l’autre. De plus, la volonté de conserver le pouvoir par tous les moyens, éloigna le zoroastrisme de la liberté de pensée et de la bonté qui le caractérisaient. D’autre part, à l’ouest de l’empire sassanide, un danger se profilait, représenté par les Arabes musulmans.
Du centre de la péninsule arabique, les Arabes lancèrent leurs attaques vers l’empire perse dès 633. Dotés d’une nouvelle religion, l’islam, ils voulaient renverser l’empire sassanide, devenu faible à cause de la corruption et des dissensions internes. Réunis sous la bannière de l’islam, les Arabes voulaient répandre leur nouvelle religion dans les pays conquis et les diriger. Les guerres entre les Arabes et les Sassanides durèrent une vingtaine d’années. Ces guerres prirent fin avec la mort de Yazdgard III (651 ap J.C.) et la victoire définitive des Arabes.
L’occupation de l’Iran constitua une catastrophe, mais ce n’était pas tout. Les Arabes musulmans propagèrent leur religion dans les régions conquises par l’épée. Donc, il y avait une nouvelle religion et un nouvel état. Le zoroastrisme qui n’était plus soutenu par les rois sassanides devenus trop faibles, resta seul face à l’islam. Au fur et à mesure que les Arabes s’implantaient de plus en plus solidement, le zoroastrisme était de plus en plus marginalisé. Les feux des temples s’éteignaient ou se détruisaient les uns après les autres, les Zoroastriens aisés quittaient le pays.
Ceux qui restaient étaient obligés, dans leur grande majorité, de se convertir à l’islam, comprenant que la richesse et le progrès social ne seraient accessibles qu’en embrassant la religion des Arabes. Les Zoroastriens durent donc négocié leur propre religion contre la nouvelle.
L’arrivée des arabo-musulmans marque un tournant important dans la vie sociale, politique, culturelle et religieuse des Iraniens. Convertis à l’Islam, les Iraniens fidèles au Zoroastrisme n’avaient que deux solutions; conversion voulue ou non voulue à l’Islam ou quitter le pays. C’est pour cette raison qu’il existe une importante communauté de Zoroastriens en Inde.
Toutefois, il existait des Zoroastriens fidèles qui n’acceptaient aucune de ces deux solutions. Comme tous les vrais fidèles de l’Histoire, ils étaient peu nombreux. Pour conserver leurs croyances et être à l’abri de la nouvelle civilisation et des mesures discriminantes, ils furent contraints de s’installer dans les villes ou villages situés dans le désert iranien : Yazd et Kerman, en particulier.
Là, ils formèrent des communautés fidèles à leurs coutumes. Donc, ce qui fait que, quatorze siècles après, leurs descendants sont considérés comme les gardiens de l’héritage national préislamique de l’Iran.
Bien que la situation sociale ne fût pas si favorable aux Zoroastriens, de petites communautés se regroupèrent dans les régions désertiques où la domination de la nouvelle religion et du nouvel état islamique s’imposait moins sur eux. Ainsi, quelques villages comme Cham deviendront le refuge des Zoroastriens. Pourtant sans convertis à l’Islam, ils devaient payer des impôts religieux (Jezieh).
Les descendants de l’une de ces petites sociétés vivent, aujourd’hui encore, dans le village de Cham près de Yazd. On peut y voir des ruines imposantes par leur grandeur encore vivante.
Cham est un village situé près de la ville de Taft à 10 km au sud-ouest de Yazd. Lorsque la société islamique devint de plus en plus importante et la société zoroastrienne de plus en plus réduite, Yazd fut l’un des peu nombreux refuges des Zoroastriens.
Ceux-ci étaient de vrais propriétaires devinrent étrangers dans leur propre patrie. Ils construisirent des temples du feu dans les différents quartiers de Yazd, ainsi qu’aux alentours, par exemple à Cham. Cham est un tout petit village où habitent seulement huit familles comprenant 27 personnes au total (en 2017).
Ces Zoroastriens, fidèles, ont au cours des siècles, été les gardiens de leur héritage ancestral dans ce coin du désert. Ils sont agriculteurs et cultivent des amandiers, des grenadiers et d’autres arbres fruitiers dans leurs vergers et parfois le blé et l’orge.
Le climat de ce village est désertique et il fait chaud, mais en entrant dans le village, une brise venue des siècles précédents vous caresse le visage, une brise de croyance, de fidélité et de résistance. Il faut visiter Cham, son «Pir Sarv» (son cyprès) et son «Dadgah» (la Tour de silence).
Cham, se situe au pied d’une colline, pas très loin de Yazd. la majorité des habitants , depuis longtemps sont les Zoroastriens. L’interdiction officielle du culte des morts zoroastriens fermenta de plus en plus leur communauté. Etant agriculteurs, ils ne sont pas nombreux dans ce petit village où un vieux cyprès reste toujours le symbole de l’antiquité préislamique iranienne.
Le cyprès de Cham, âgé de trois mille ans, est enregistré sur la liste des œuvres naturelles et nationales de l’Iran. Cet arbre de 18 mètres de hauteur, porte les traces de nombreux événements. A maintes reprises, il a failli mourir et être coupé, mais il est resté vivant. L’histoire de cet arbre n’est-elle pas semblable à celle des habitants de Cham? Les deux sont des symboles de la résistance.
Les grenadiers et les muriers dont les branches penchent hors des murs des jardins. Ceci transpose le village en un lieu magnifique. Les allées jardinières aux murs en pisé conduisent chaque visiteur au bout du monde, à la rencontre de la mystique zoroastrienne.
Situé dans la cour d’un temple du feu, ce cyprès est appelé «Pir Sarv», ce qui veut dire «le vieux cyprès». Il est un lieu de pèlerinage pour les Zoroastriens. Ces derniers allument des bougies ou des lampes au pied de cet arbre. Ils y attachent des tissus en demandant la grâce.
Les pèlerins croient que le cyprès exauce leurs vœux. Quand ils obtiennent ce qu’ils souhaitent, ils participent à des cérémonies et remercient Dieu. Les vieillards du village racontent comment des sauterelles prirent d’assaut l’arbre et les circonstances dans lesquelles des coups de vent violents provoquèrent une fente dans son tronc. Malgré tout, le cyprès a résisté et il est resté le symbole de ce village. Depuis, cette fente est surveillée de près et soignée.
De plus, Cham est connu pour son complexe funéraire et sa tour du silence appelés par les Zoroastriens «dadgah», «dakhma» ou encore «borj-e-khamouchan». Certains chercheurs pensent que selon les enseignements de Zoroastre, l’ensevelissement des morts était un péché mortel, car souillant la terre. Donc, on exposait le cadavre des morts à la lumière du soleil afin de le préserver de la putréfaction. C’est ce lieu d’exposition que l’on appelle «tour du silence». On construisait ces dakhmas sur des rochers ou des montagnes. Ces tours rondes possèdent des murs épais construits avec des matériaux solides et résistants.
Un escalier relie le terrain plat à la porte de la tour. L’intérieur circulaire de la tour est divisé en quatre zones concentriques. La partie circulaire contre le mur extérieur de la tour était consacrée aux hommes. Le deuxième cercle aux femmes, le troisième aux enfants. Le quatrième était le lieu où l’on conservait les ossements. Ce dernier cercle comprenait un puits au centre de la tour où l’on jetait les os sans recouverts de chair et de peau. L’ensemble funéraire de Cham se situe à l’est du village. Ces instalations comprennent l’auberge, la loge du gardien, la tour de la lanterne, le brasero et la tour du silence.
Les premiers espaces sont considérés comme secondaires. Car une grande partie des cérémonies avait lieu dans les chambres inférieures de la tour du silence proprement dite. L’auberge était le lieu de repos temporaire accueillant les pèlerins qui venaient de l’extérieur du village.
Dans l’auberge , il y avait une sorte de cuisine munie d’un four, des chambres, un débarras… Le gardien , en général, un homme âgé, vivait seul dans ce lieu, loin de sa famille. Il était responsable du feu de la lanterne de la tour. Donc, il devait veiller à ce qu’il ne s’éteigne pas pendant la nuit.
Les installations abandonnées se trouvent à deux kilomètres du village. Ils y préparaient les morts afin de les exposer dans les tours de silence. Ce lieu crée un lieu magique aux yeux des voyageurs qui y parviennent au coucher du soleil rougissant la terre et les rochers. La tour de lanterne au toit conique est un bâtiment unique qui ne se trouve pas dans les autres lieux du culte zoroastrien. Du point de vue rituel, la lumière de la lanterne offrait la tranquillité aux esprits des hommes et des morts.
La tour de la lanterne était un bâtiment élevé et conique où se trouvaient trois fenêtres dont deux donnaient sur Cham et le village voisin de Mobarakeh et la troisième sur la tour du silence. Juste en face de cette dernière fenêtre, il y avait une ouverture dans le mur du dakhma pour que la lumière puisse pénétrer à l’intérieur. La lanterne jouait le rôle des tours qui guidaient les voyageurs.
Du point de vue rituel, la lumière de la lanterne offrait la tranquillité aux esprits des hommes et des morts. Le lieu où se trouvait le feu s’est construit avec de la brique crue et de la pierre. La forme de ce bâtiment était un mélange de carré et de demi-cercle. Il y avait deux plateformes pour s’asseoir et une ouverture permettant de voir le feu.
Dans ce lieu, une cérémonie semblable à celle du lavage des morts chez les musulmans avait lieu.En suite, on mettait de l’huile et des plantes spéciales sur le feu et des prières étaient psalmodiées. On croyait que la fumée de ce feu éloignait l’impureté et la saleté du cadavre.
La tour du silence est un bâtiment de deux étages, la cour se trouve au deuxième étage. La pierre sur laquelle on déposait le mort se trouve à côté de la chambre du deuxième étage et au grand air. Un escalier permettait d’accéder à cette partie et conduisait à la porte en fer de la tour. Les agents de la cérémonie entraient dans la cour principale par cette porte et mettaient les cadavres au sol.
Une fosse au centre de la cour permettait d’y déposer les ossements (Ossuaire). Ils ont construit la tour sur une montagne et elle dominait les autres parties constituant cet ensemble. Pourtant les zoroastriens ont utilisé la tour du silence de Cham pour leur dernière cérémonie. En 1970, L’état du Chah à interdit les cérémonies susmentionnées. Malgré cette interdiction, il y a encore des personnes qui visitent ce lieu, y allument un feu. Ils y jettent des plantes sauvages et de l’encens et mangent des fruits en souvenir des morts.
Le bâtiment principal est la tour de silence avec un ossuaire au milieu. La tour du silence de Cham fut la dernière à être utilisée. Cham est encore actuellement un lieu saint et vénéré pour les Zoroastriens iraniens.
Cham est encore actuellement un lieu saint et vénéré pour les Zoroastriens iraniens. Ce village permet de se remémorer des scènes de la vie des siècles passés en Iran. On peut toujours visiter les maisons en terre et voir les fours, les cheminées et les jarres de blé ou d’orge. Cham et son dakhma ont été enregistrés en tant que patrimoine culturel de l’Iran.